Un article de Sandro Magister, vaticaniste à L'Espresso, en traduction française sur Diakonos.be, avec quelques notes de discernement de Pierre et les Loups.
Le souci, c'est que quand c'est ce qu'on fait, c'est-à-dire, quand on collecte les questions de la base ou que l'on sonde l'opinion des fidèles, les résultats sont pratiquement identiques à ceux dictés par les élites dominantes ou par les pressions extérieures, avec la sempiternelle litanie de demandes qui vont des prêtres mariés aux femmes prêtres, en passant par la nouvelle morale sexuelle et la démocratisation du gouvernement de l'Église.
Note de Pierre et les Loups
L'Eglise n'est pas une démocratie mais une monarchie. Il est dès lors absurde de vouloir adapter l'enseignement de l'Eglise — qui est celui du Christ et donc immuable — ou sa façon d'être gouvernée suivant ce que souhaitent ses membres, surtout si ceux-ci sont davantage influencés par l'esprit de ce monde que par celui du Christ.
De l'avis d'un ami prêtre :
« Mon intuition sur l'issue de ce synode est qu'il sera fatalement un changement grave pour l'Eglise. Consulter les fidèles est en principe très bien, mais des fidèles qui ont été bombardés d'idéologies et de mensonges ne peuvent que se faire l'écho des opinions du monde en lesquelles ils baignent.
Nous allons à la catastrophe, car la minorité fidèle sera écrasée. Notamment par les manœuvres auxquelles nous sommes habitués [propagande médiatique].
Il sera alors quasi logique qu'un avertissement céleste doive intervenir.
C'est mon humble avis. »
Lire : Garabandal : Les événements de la fin des temps seront précédés d'un important synode
Ses craintes sur le synode d'Allemagne, le Pape François les a partagées dans une lettre de juin 2019 qu'il a « rédigée entièrement lui-même ». Mais ensuite, il l'a laissé suivre son cours sans plus chercher à le freiner ni faire mine ne fût-ce que d'écouter les cris d'alarmes lancés par le cardinal Walter Kasper, qui au début du pontificat était son théologien réformateur de référence, mais qui, en ce qui concerne le synode allemand – une « tentative de coup d'État », comme il l'a défini – doute même qu'il soit « vraiment catholique ».
L'Antéchrist est dans la hiérarchie de l'Eglise en ce moment, et il a toujours voulu s'asseoir sur la Chaire de Pierre. Le Pape François sera comme Pierre, l'apôtre. Il se rendra compte de ses erreurs et essaiera de ramener l'Église sous l'autorité du Christ, mais il n'y parviendra pas. Il sera martyrisé.
— Père Michel Rodrigue, Retraite virtuelle, partie 5 ; lire Un Pape pour notre temps
Et ce n'est pas tout. Le risque est toujours plus palpable de voir l'agenda du « chemin synodal » d'Allemagne finir dans cet autre synode de l'Église universelle que le Pape a convoqué en 2021, le faisant partir, justement des périphéries et de la base, et qui culminera avec une session à Rome en octobre 2023.
Au départ, la convocation de ce synode général n'a pas vraiment fait parler d'elle. Le thème que le Pape François lui avait assigné, la « synodalité », semblait à ce point abstrait et ennuyeux qu'il avait dissuadé les médias de s'y attarder.
Mais ensuite, à peine les diocèses ont-ils commencé à sonder les avis des prêtres et des fidèles qu'on a tout de suite vu à quel genre de litanie de demandes on avait affaire. Avec pour résultat qu'à présent, les conférences épiscopales, dans leurs synthèses de la première phase décentralisée du synode, se retrouvent avec entre les mains une copie conforme du « chemin synodal » d'Allemagne, issu de leurs propres fidèles.
La France est un cas d'école. À la mi-juin, la conférence épiscopale française s‘est réunie en session extraordinaire précisément pour élaborer une « Collecte des synthèses synodales » produites par les différents diocèses, et la transmettre à Rome. Au moment de voter le document, la Conférence épiscopale n'en a pas approuvé le contenu, se limitant à constater l'adhésion de milliers de prêtres et de fidèles interrogés à ces demandes. Mais les demandes envoyées à Rome incluent justement le dépassement du célibat du clergé, l'ordination des femmes au diaconat et à la prêtrise ou à tout le moins, « comme premier pas », le fait qu'on leur confie des homélies à la messe, une réforme radicale de la liturgie et de son langage « désormais irrecevables », l'admission généralisée aux sacrements des divorcés remariés et des couples homosexuels.
En Irlande, c'est pareil. En plus des comptes-rendus des consultations dans chaque diocèse, les évêques se sont fendus d'un grand sondage d'opinions parmi les fidèles. Il en résulte que la quasi-totalité des catholiques irlandais veut des prêtres mariés et des femmes prêtres, 85% souhaitent le dépassement de la condamnation des actes homosexuels, 70% veulent que les laïcs puissent également disposer du pouvoir de décision dans l'Église et d'autres encore voudraient qu'on en finisse à la messe avec les lectures « sanglantes » de l'Ancien Testament.
Sœur Nathalie Becquart, la sous-secrétaire à Rome du synode sur la synodalité, qui était présente à la réunion de la Conférence épiscopale d'Irlande de la mi-juin, a déclaré qu'en deux mille ans d'histoire, c'était la première fois que l'Église donnait vie à une consultation aussi universelle, que le Pape François a voulu faire partir de la base. Personne ne sait où ce synode s'arrêtera, a-t-elle conclu, mais c'est justement pour cela qu'il faut être ouverts aux « surprises de l'Esprit Saint » [sic].
Sœur Becquart, qui aura le même droit de vote que les évêques au synode, fait partie du tiercé nettement progressiste que le Pape François a mis à la tête du synode sur la synodalité, tout comme le secrétaire général, le cardinal maltais Mario Grech et le rapporteur général, le cardinal luxembourgeois et jésuite Jean-Claude Hollerich.
Et comme si cela ne suffisait pas, le Pape François a flanqué ces deux cardinaux d'un groupe de travail sur la manière de concilier le synode allemand avec celui de l'Église universelle. Cette information a été donnée par le président de la Conférence épiscopale d'Allemagne, l'évêque du Limbourg Georg Bätzing, dont les velléités révolutionnaires vont encore plus loin que celles, déjà très téméraires, de Mgr Hollerich lui-même, au point d'avouer qu'il était « déçu » des avancées trop lentes du Pape.
Le président de la conférence des évêques d'Allemagne a exprimé dimanche sa déception à l'égard du Pape François, insistant sur le fait que « l'enseignement de l'Église catholique » doit être « changé », notamment en ce qui concerne l'homosexualité et le rôle des femmes.
Dans une interview du 22 mai, Mgr Georg Bätzing a exprimé sa « déception » envers le pape, ajoutant : « Mais dans le sens d'une tromperie ». [...] Bätzing a utilisé les mots allemands proches Enttäuschung (« déception ») et Täuschung (« tromperie »). (Ndtr, c'est-à-dire que ces évêques ne sont pas seulement déçus du Pape François mais cherchent à le tromper, à se servir de lui pour accomplir un changement dans la doctrine de l'Eglise, que le Pape ne peut faire.)
Expliquant ce qu'il entendait par là, l'évêque a déclaré : « Le pape, même dans l'Église catholique, même avec tous les pouvoirs qui lui sont conférés, n'est pas quelqu'un qui pourrait renverser l'Église de la tête aux pieds, ce que nous souhaiterions faire. »
« Je crois que dans la réalisation finale de ce qu'est notre image de Dieu et de l'homme, la discrimination contre les homosexuels, les personnes vivant en couple, par exemple, ne doit pas être présentée comme une interdiction, mais comme une possibilité qui doit être appréciée au cas par cas. » (...)
« Le sensus fidelium (*), c'est-à-dire le sens des fidèles, a évolué », a déclaré Bätzing. « C'est un signe que nous devons assumer théologiquement et qui conduit au changement. Et c'est ce à quoi je m'engage. Donc, je ne m'assieds pas dans un fauteuil en disant « c'est comme ça maintenant », mais je donne vraiment beaucoup de force pour y parvenir. Et je crois que le changement va se produire.
— catholicnewsagency.com (ajout)
(*) Note de Pierre et les Loups : le sensus fidelium est le sens de la foi profondément enraciné dans le peuple de Dieu qui reçoit, comprend et vit la Parole de Dieu au sein même de l'Eglise. On ne peut pas parler du sensus fidelium pour des fidèles qui ne fréquentent pas l'Eglise, rejettent la parole de Dieu, ne forment pas leur foi et ne vivent pas en adéquation avec l'enseignement moral de l'Eglise. Il est donc trompeur de vouloir utiliser ce terme pour changer l'enseignement de l'Eglise, sous prétexte que c'est ce que les "fidèles" souhaiteraient. Les vrais catholiques fidèles ne souhaitent pas changer l'enseignement de l'Eglise mais le vivre toujours plus intensément et fidèlement !
C'est en vain que plusieurs évêques et cardinaux ont frappé à la porte du Dicastère pour la doctrine de la foi, en demandant que les thèses les plus hardies du cardinal Hollerich soient démenties, surtout celles qui renversent la doctrine sur la sexualité et l'homosexualité. Le dicastère se tait et tout le monde pense qu'elle est muselée par le Pape [Note de Pierre et les Loups : ce qui n'est pas nécessairement le cas. Lire : Prophéties de la Bienheureuse Anne-Catherine Emmerich sur le temps des deux Églises et des deux Papes.
Parmi les nouveaux cardinaux annoncés par le Pape François le dimanche de l'Ascension, au moins deux sont des paladins de cette révolution doctrinale : l'évêque de San Diego, Robert McElroy et l'archevêque de Manaus, Leonardo Ulrich Steiner.
La politique de la carte blanche accordée par le Pape au « chemin synodal » allemand a pour conséquence que le nombre de ceux qui s'estiment autorisés à se comporter de la sorte ne cesse de grandir au sein de l'Église.
Note de Pierre et les Loups
Ils ne « cessent de grandir au sein de l'Église », comme l'ivraie !
Je pense personnellement que Dieu permet cela pour mener l'ivraie et le bon grain à maturité et pouvoir ensuite les séparer quand l'heure de Sa Justice aura sonné. Et il n'y a pas de stratégie plus efficace pour parvenir à faire ce tri que de laisser chacun exprimer librement ce qu'il a au fond du cœur. La Justice divine ne pourra frapper qu'une fois que les masques seront tombés ; ainsi les bergers et brebis infidèles pourront ensuite être balayés s'ils ne reviennent pas sur le droit chemin quand se produira le Grand Avertissement — qui doit précéder ce grand Jour de Justice et de balayage universel.
« Voici que cet enfant provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël [*]. Il sera un signe de contradiction – et toi, ton âme sera traversée d'un glaive : ainsi seront dévoilées les pensées qui viennent du cœur d'un grand nombre. »
Luc 2 : 34-35
[*] Si l'Eglise est le nouvel Israël, et si ce passage s'applique bien au Pontificat de François comme je le pense, nous finirons par voir François devenir un signe de contradiction (ou de rejet). Cela a toujours été le cas pour chacun des papes par le passé et François ne fera pas exception. Peut-être pas plus tard qu'à la fin de ce synode (car ce n'est pas parce qu'il les laisse s'exprimer, que François approuvera toutes leurs propositions à la fin). Quand on voit la déception qu'il suscite aujourd'hui chez tant de bergers progressistes nous voyons qu'il commence déjà à devenir un signe de contradiction et cela n'ira qu'en s'intensifiant.
Mais c'est ensuite que les bergers infidèles (à qui François a donné tant de liberté) chuteront et que les bergers fidèles (qui auront semblé être mis de côté) seront relevés. L'âme de Marie qui est l'âme de chacun des membres fidèles du Corps du Christ est traversée d'un glaive face à tant de confusion actuellement ; face aussi à la souffrance prochaine du Saint-Père. Mais nous comprenons que cette confusion est nécessaire pour que soient « dévoilées les pensées qui viennent du cœur d'un grand nombre ». Ne jugeons donc pas trop vite François s'il donne tellement de liberté à ces loups, cela fait probablement partie d'une stratégie divine que nous comprendrons plus tard.
« Le royaume des Cieux est comparable à un homme qui a semé du bon grain dans son champ. Or, pendant que les gens dormaient, son ennemi survint ; il sema de l'ivraie au milieu du blé et s'en alla. Quand la tige poussa et produisit l'épi, alors l'ivraie apparut aussi. Les serviteurs du maître vinrent lui dire : “Seigneur, n'est-ce pas du bon grain que tu as semé dans ton champ ? D'où vient donc qu'il y a de l'ivraie ?” Il leur dit : “C'est un ennemi qui a fait cela.” Les serviteurs lui disent : “Veux-tu donc que nous allions l'enlever ?” Il répond : “Non, en enlevant l'ivraie, vous risquez d'arracher le blé en même temps. Laissez-les pousser ensemble jusqu'à la moisson ; et, au temps de la moisson, je dirai aux moissonneurs : Enlevez d'abord l'ivraie, liez-la en bottes pour la brûler ; quant au blé, ramassez-le pour le rentrer dans mon grenier.” »
Mt 13: 24-30
« Laissez-les pousser ensemble jusqu'à la moisson » — Laissez-les chacun s'exprimer, jusqu'au temps de la moisson !
En Allemagne, on parle encore de l'affaire de ces trois cents frères franciscains qui ont élu comme supérieur provincial Markus Fuhrmann, qui avait défrayé la chronique quelques semaines plus tôt pour avoir publiquement déclaré qu'il était homosexuel, en plus d'être un ardent promoteur des nouveautés les plus hardies en chantier dans le « chemin synodal » allemand.
Et quelques jours plus tard, toujours en Allemagne, le numéro un de la hiérarchie allemande, le cardinal Reinhard Marx, archevêque de Munich et membre de premier plan de conseil restreint des cardinaux créé par le Pape pour l'assister dans le gouvernement de l'Église universelle, a réclamé pour la énième fois les mêmes nouveautés – y compris la bénédiction à l'église des unions homosexuelles, expressément interdite par le Vatican.
En Suisse, dans le diocèse de Coire, l'évêque Joseph Marie Bonnemain a contraint les prêtres et les collaborateurs diocésains à signer une charte arc-en-ciel où ils s'engagent entre autres à « renoncer à tout jugement globalement négatif sur de prétendus comportements non bibliques en matière d'orientation sexuelle ».
En Italie, dans l'archidiocèse de Bologne, ce 11 juin, un couple d'hommes s'est marié civilement à la commune et, immédiatement après, a célébré son union à l'église, à l'occasion d'une messe présidée par le responsable de la pastorale familiale de l'archidiocèse, don Gabriele Davalli. Un communiqué de l'archidiocèse a ensuite tant bien que mal tenté de justifier ce qui s'était passé, en prétendant qu'il s'agissait simplement – contre l'évidence des faits – d'une messe d'action de grâce pour le groupe catholique LGBT « In cammino », dont ces deux hommes font partie. Mais il n'a échappé à personne que l'archevêque de Bologne est le cardinal Matteo Zuppi, qui depuis un mois est le président, nommé par le pape, de la Conférence épiscopale italienne et le premier en lice des papabili [candidats éligibles à la succession] lors d'un futur conclave. On peut s'attendre à ce que cet épisode ruine ses chances de succéder à François, en lui faisant perdre les quelques votes qu'il aurait pu récolter auprès des cardinaux de tendance conservatrice.
Bref, la contagion du « chemin synodal » d'Allemagne, non maîtrisée par le Pape, a désormais franchi les frontières et menace de conditionner le synode général sur la synodalité lui-même. La vibrante lettre ouverte envoyée aux évêques allemands le 11 avril par les cardinaux Francis Arinze, Raymond Burke, Wilfried Napier, George Pell, Camillo Ruini, Joseph Zen et par une centaine d'archevêques et d'évêques du monde entier n'aura servi à rien.
Le cardinal Kasper dénonce également le risque que l'Église catholique ne se transforme en une sorte de synode permanent, à la demande de la base, c'est-à-dire de la culture dominante, qui en tirerait les ficelles.
Quoi qu'il en soit, de l'avis d'un autre cardinal, l'italien Camillo Ruini, une bonne partie de l'Église a déjà franchi les limites de la doctrine catholique au moins sur un point : l'approbation des actes homosexuels. « Je ne nie pas qu'il y ait un risque de schisme », a-t-il déclaré dans une interview accordée à « Il Foglio » le 4 mai dernier. « Mais je garde confiance qu'avec l'aide de Dieu, on puisse le surmonter ».
Lire : Conchita : Le Grand Avertissement sera précédé d'un important Synode